17 août 2014

Chronique des confins

"Dans la vraie vie les faits divers n'ont ni commencement ni fin."
 Roger Grenier


Le culte de la rapidité a tendance à détourner la pensée contemporaine de toute idée de profondeur et de prolongement. Le monde devient alors une surface lisse, où tout glisse d'un bord à l'autre de la scène - en l'occurrence de l'écran. Entrée et sortie. L'envoûtement généré par les artefacts de communication informatique nous donne l'illusion habile de proximité et d'appréhension immédiate de notre environnement cognitif. Mais tout ça n'est en somme que du vent, du simulacre. Une sorte de décor qu'on nous demande de valider de façon répétitive, afin de mieux nous manipuler.
 
Osons enfin nous poser cette question : que nous reste-il vraiment au bout d'une heure de surf sur le web ? Les petits films amusants ou attendrissants sur YouTube, vus par l'ensemble de la planète connectée dans le temps utilitaire des vingt-quatre heures. Les alertes-fantôme et les nouvelles éphémères qui monopolisent tout l'espace mental, à défaut d'une réflexion autonome. Dans un tel contexte il n'y a plus guère de place pour le moindre développement théorique, sans même parler d'un début de méditation philosophique.
 
Si cet emploi du temps externalisé à outrance provoque une sorte de dépression généralisée, ce n'est pas parce que les nouvelles du monde ne sont guère réjouissantes, mais tout simplement parce que nous n'avons plus aucune familiarité avec la notion d'infini, ni même la simple perspective d'une vue d'ensemble. La recherche compulsive de l'instantanéité a massivement remplacé les constructions intellectuelles et les jeux conceptuels audacieux qui requièrent un temps long, des allers et retour, des nuances et des errements successifs.

En ce beau dimanche oisif laissons donc dériver librement notre pensée sur sa trajectoire favorite, celle qui n'a jamais de fin ...


 

 

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