26 décembre 2015

Apartés

 
Dès le plus jeune âge, l'exercice le plus exigeant de tout être conscient est de pouvoir manier sa pensée en vue d'en obtenir en permanence les meilleures performances, de la même manière que le corps doit trouver ses postures optimales en toute circonstance.
 
Par conséquent, l'individu devrait rapidement apprendre à reconnaître ce qui lui appartient en propre et ce qu'il doit partager avec l'extérieur. Sa conscience d'abord lui appartient et nul autre que lui même ne devrait par principe y avoir accès. Et c'est bien là que le bât blesse...
 
En effet, la réalité est un matériel mouvant qui, dans certains cas, ne semble même pas avoir d'existence propre ou en tout cas, indépendante de la pensée. Parfois réalité et pensée s'entremêlent si bien, qu'en une danse parfaite les deux ne font plus qu'un. D'autre fois, comme dans un vieux couple qui boude, la pensée et la réalité s'évitent et se tournent le dos. Et ce scénario est appelé à se répéter à de nombreuses reprises tant qu'un certain palier mental n'est pas encore franchi. Il s'agit souvent d'adopter la même audace que lorsqu'on se jette à l'eau pour nager ses premières brasses !

Peu à peu la confiance s'installe et la pensée comprend soudain qu'elle est un facteur indispensable à l'organisation et au déroulement même du réel. Tout le reste n'est plus que l'exploration infinie de cette révélation. Les religions, les philosophies, les enseignements, les psychologies et plus récemment les medias ont tous leur petit avis sur la question et ne se privent pas de vanter leurs propres méthodes dans une surenchère argumentaire.

L'essentiel étant finalement d'être soi-même à l'aise dans sa propre pensée car elle est notre véritable habitat, notre seul véhicule et notre ultime réconfort...
 
 
 

5 décembre 2015

Introversion



En cette époque si foisonnante en innovations mirifiques et où la connectivité nous tient désormais lieu de cordon ombilical, voire de lien secret avec d'invisibles et puissants maîtres, nous aurions tout intérêt à plonger plus souvent dans notre for intérieur.
 
Certes, nous n'en avons plus guère l'habitude ni le temps puisque tous nos instants libres sont régulièrement mobilisés par ces innombrables et fumeuses activités relevant d'un "réseau social", et qui seules semblent aujourd'hui garantes d'une véritable ouverture sur autrui et sur le monde. Ordinateurs et téléphones portables sont les précieux sésames qui nous donnent l'illusion du libre accès au savoir infini de nos nouveaux maîtres à penser, Google et Wikipedia. Avec eux fini l'ennui, les mortels après-midi du dimanche à bailler devant la télévision. Un petit clic distrait et on est parti pour des heures de découvertes fantastiques. On saute d'une thématique à l'autre, tel un ours polaire bondissant de bout de glacier en glaçon. C'est tellement vivifiant, on a enfin le sentiment intense d'exister...

Dans un tel contexte d'extraversion, certains fanatiques de la connexion vont jusqu'à présenter des symptômes aigus de claustrophobie lorsque sonne l'heure de passer sous la douche et de se séparer de leur smartphone. Pour améliorer leur confort mental, il leur sera avantageusement prescrit de se munir d'un walkman imperméable, afin qu'un peu de musique délassante puisse leur permettre de passer sous le jet sans trop angoisser jusqu'au prochain snif connectif.

Et pourtant un peu de recul, un petit devoir d'analyse qu'on s'offrirait à soi-même pourraient ouvrir de bien étranges perspectives sur cette forme de lobotomisation ludique qui nous est comme imposée de l'extérieur. Par exemple, on pourrait accorder quelques instants de réflexion aux changements exogènes et endogènes entraînés par un connectivisme généralisé. Et ceux-ci seraient-ils susceptibles de nous conduire à une forme inédite de collectivisme, voire à une dictature ?

Voilà sans doute quelques pistes de méditation fort passionnantes...



Illustration :

The Chalk Guy