29 août 2014

La véritable nature du net par l'erreur 503


Il vous est sans doute déjà arrivé de vouloir consulter une page familière, ou d'apporter quelque modification à votre site pour tomber inopinément sur une porte close : l'erreur 503 nous explose à la figure, indiquant que le serveur est momentanément inapte à traiter notre requête HTTP.
 
Et voilà ! pressé ou pas pressé, ce sera donc l'angoisse du vide et la solitude au large de l'hypertexte. Face à l'insolent déni de service il n'existe aucun moyen de négocier un protocole de transfert, le serveur étant où bon lui semble, dans les nuages ou peut-être sous le niveau de la mer ... avec nos inestimables données personnelles.
 
C'est ici que devrait normalement s'allumer en nous une petite lueur de vigilance, sinon de paranoïa. Après tout, depuis combien d'années sommes-nous ainsi conditionnés à déposer en ligne nos biens les plus précieux (souvenirs, photos, échanges, courrier, commerce, œuvres artistiques, etc...) ? Pourquoi devrions-nous ainsi nous délester sur le net de tout ce qui remplit nos vies, des conversations de bar aux grandes questions philosophiques ? Qu'est-ce qui nous pousse à monter dans ce train comme du bétail qu'on pousse dans les wagons, par centaines, par milliers. Toujours plus d'adeptes - et moins de services de la part des opérateurs, l'aurez-vous aussi remarqué ?
 
En vérité, la nature du Net est cryptographique, dans le sens où il s'agit d'une trame à résonances multiples. Comme toutes les trames (voir les toiles d'araignée), elle est composée de signes et de vide. Cette sémantique est grisante, vertigineuse et addictive. Nous en sommes tous les disciples plus ou moins consentants, bien qu'un peu naïfs. On voit pourtant se profiler déjà quelques signaux moins ludiques, des modifications dans les règles du jeu encore éparses et plutôt anodines. Des mots qui disparaissent, des livres qu'on copie, des auteurs qu'on oublie de citer, des citations que l'on falsifie comme à dessein ...
 
Contrairement à la légende, la recherche et la vérification des informations sont plus sujettes à caution que jamais. Pour des adultes cultivés d'âge mûr (qui disposent par conséquent de multiples points de comparaison), le constat est sans appel : trop de lacunes, trop d'erreurs et d'inexactitudes se répandent sur le web. A tel point qu'il n'est pas impossible qu'il s'agisse d'une stratégie concertée plutôt que d'un concours de circonstances. Dès lors, ne serait-il pas opportun de lire dans ces marquages successifs les signes précurseurs d'un remplacement programmatique de civilisation ? A moins qu'on ne préfère employer un terme qu'on croyait définitivement passé de mode, celui de rééducation de masse.
 
A méditer et à tester en faisant quelques recherches pointues sur Google.
 
 
 

22 août 2014

Le Web a-t-il une existence ?


Voici enfin un débat digne de la haute scolastique médiévale, spécialisée dans l'art subtil des prises de tête addictives. A force d'aller et venir sous les voûtes des cloîtres on devient forcément un peu métaphysicien, forcément. Et bien malin qui pourrait trancher la question au doigt levé, si ce n'est l'inévitable professeur Edgar Morin par ailleurs architecte autoproclamé de la pensée complexe !
 
En effet, ce n'est pas parce qu'un labyrinthe recèle des embranchements cachés voire occultes, qu'ils n'existent pas. D'un autre côté, on peut soutenir que tout ce qui ne parvient pas à éclosion dans la conscience n'a qu'un degré d'existence fictionnel. Comme on s'avise assez vite qu'il retourne d'un problème à niveaux et combinaisons multiples, il vaut mieux prendre les devants et choisir soigneusement son aire d'atterrissage si on ne veut pas se retrouver largué dans la stratosphère. Oublier les cloisonnements simplistes, à gauche le web existe, à droite il n'existe pas. C'est embêtant, mais pas fatal ...

Gardons à l'esprit que l'important c'est le cheminement, le glissement de nos sandales sur les dalles. Il n'est requis que de tourbillonner au travers de la matière, d'aller jusqu'aux confins et revenir sans même bouger d'ici. Toutes les issues sont ouvertes, mais vérifier quand même.

Déjà se faire une idée de l'affaire en cours en attendant une analyse plus fouillée, à temps perdu. Agenda surchargé en ce mois d'août torride, pas une minute à soi, actualité trépidante, boîte de mails qui déborde ...


 


 

19 août 2014

Séquence de la joie pure

Rien de spécial. Ce matin le ciel est voilé, il fait beaucoup trop frais pour un mois d'août.
 
Temps maussade et ruminations courantes. Assumer les habituels petits tracas physiologiques du réveil : uriner, déféquer, cracher, se moucher.. Et encore un café noir dans ma tasse à thé japonaise. Choses à faire qu'on repousse toujours au surlendemain puisqu'on se sent immortel.
 
Sans raison précise en cet instant naît la joie, joie profonde. Et cet instant dure. Se poursuit en tant que revenir de l'instant aussi bien qu'en tant que souvenir de l'instant qui revient. Joie pure de l'instant qui ne finit pas.
Deux heures plus tard, cette joie n'a toujours pas cessé. Ce ne sont pourtant pas les motifs de mauvaise humeur qui manquent, il y a toujours un petit bug quelque part pour nous casser  l'ambiance. Et pourtant la joie dure.
 
C'est donc une joie de nature métaphysique, qui n'est pas fondée sur des critères fluctuants ni sur des événements spécifiques. Une joie qu'on doit pouvoir aisément retrouver puisqu'elle s'installe pour toujours. Une fois qu'on a appris à nager, on saura toujours nager.
 
Ainsi donc,  joie parfaite à tous les êtres ...
 
 

 

 



18 août 2014

Du surf anonyme au fichage intégral

Il y a quelques années à peine, il était encore de bon ton de naviguer sur le net en toute discrétion, affublé de quelque pseudonyme héroïque comme Baroudeur et Moonrider, poético-symbolique comme Gardienne des runes, ou encore romantique comme Fleurbleue. Laisser apparaître son véritable patronyme était la preuve flagrante d'une irrécupérable ringardise. On se la jouait incognito pour le fun mais aussi pour le frisson, plus que par crainte de se faire détrousser par les voleurs de grand chemin. C'était la belle époque, le web était alors une forêt enchantée, un immense terrain de jeux ...

Mais la récréation est déjà finie, les paradigmes ont changé. Pour se connecter, il faut maintenant montrer patte blanche et livrer un maximum de données personnelles sous le prétexte fallacieux d'une protection plus efficace contre les méchants hackers et autres terroristes. Protection qui n'est finalement qu'une collecte de détails visant à cibler au plus près les goûts et couleurs des veaux, pardon des clients potentiels que nous sommes. En réalité, on voit bien comment on nous a appâté en nous promettant monts et merveilles. Nous avons déjà livré tous nos secrets à l'hydre tentaculaire et qu'avons-nous eu en échange ? De fausses informations, des coups montés de toute pièce, des sites aux stores baissés depuis belle lurette. De la poussière de mots et des algorithmes inexorables : les spiders des moteurs de recherche qui parcourent inlassablement les registres de la culture humaine pour la disperser par toutes petites bribes.

Vous je ne sais pas, mais moi j'aime bien les gros cahiers à spirales ...


 



17 août 2014

Chronique des confins

"Dans la vraie vie les faits divers n'ont ni commencement ni fin."
 Roger Grenier


Le culte de la rapidité a tendance à détourner la pensée contemporaine de toute idée de profondeur et de prolongement. Le monde devient alors une surface lisse, où tout glisse d'un bord à l'autre de la scène - en l'occurrence de l'écran. Entrée et sortie. L'envoûtement généré par les artefacts de communication informatique nous donne l'illusion habile de proximité et d'appréhension immédiate de notre environnement cognitif. Mais tout ça n'est en somme que du vent, du simulacre. Une sorte de décor qu'on nous demande de valider de façon répétitive, afin de mieux nous manipuler.
 
Osons enfin nous poser cette question : que nous reste-il vraiment au bout d'une heure de surf sur le web ? Les petits films amusants ou attendrissants sur YouTube, vus par l'ensemble de la planète connectée dans le temps utilitaire des vingt-quatre heures. Les alertes-fantôme et les nouvelles éphémères qui monopolisent tout l'espace mental, à défaut d'une réflexion autonome. Dans un tel contexte il n'y a plus guère de place pour le moindre développement théorique, sans même parler d'un début de méditation philosophique.
 
Si cet emploi du temps externalisé à outrance provoque une sorte de dépression généralisée, ce n'est pas parce que les nouvelles du monde ne sont guère réjouissantes, mais tout simplement parce que nous n'avons plus aucune familiarité avec la notion d'infini, ni même la simple perspective d'une vue d'ensemble. La recherche compulsive de l'instantanéité a massivement remplacé les constructions intellectuelles et les jeux conceptuels audacieux qui requièrent un temps long, des allers et retour, des nuances et des errements successifs.

En ce beau dimanche oisif laissons donc dériver librement notre pensée sur sa trajectoire favorite, celle qui n'a jamais de fin ...


 

 

16 août 2014

Ce qu'un moteur de recherches ne peut pas faire (même s'il est très malin)

Un moteur de recherches ne sait pas lire entre les lignes. Autrement dit, il est dépourvu de l'imagination et de la sensibilité qui lui permettraient d'extrapoler de manière non linéaire à partir des données dont il dispose.
 
Tout est là : c'est en effet le principe de non-linéarité qui permet de déterminer avec précision si une intelligence est humaine ou robotique. Les postures mentales faisant appel à la créativité artistique ou la faculté de théoriser sont typiquement des activités qui développent le saut conceptuel non-linéaire. Ce seuil critique où tout peut basculer dans un autre univers ...

Un second indice révélateur de l'intelligence dite artificielle peut être la régularité. Avez-vous déjà vu un robot faire la sieste au boulot ? Si par contre votre collègue Alcibiade arrive systématiquement en retard tous les lundis matin, méfiez-vous et prenez les devants. Faites-lui passer le test Google+. S'il commence à vous aligner toutes les niaiseries les plus communes et les concepts les plus infantiles, son compte est bon. Virez-le sans état d'âme, non sans avoir au préalable vidé sa mémoire plutôt deux fois qu'une.

Voilà qui est dit, mais il fallait le dire ...

 

14 août 2014

Un théoricien peut-il encore théoriser sans se doper aux sources du web ?

Pour toute intelligence, le fait de donner du sens aux événements implique d'avoir à plonger dans le vide de l'entre-deux pour effectuer des sauts théorétiques plus ou moins complexes. Ce qui veut dire entre autres choses, qu'il faut être capable de se replier dans les paysages de son propre esprit ... ne serait-ce que momentanément, pour aller y repêcher quelque citation ou quelque vague souvenir.
 
Or les nouvelles entités technomédiatiques font tout pour empêcher ces sauts cognitifs en proposant d'innombrables stratégies de distraction ou pire encore, des programmes de gestion de la pensée "clés en main". De fait, on constate déjà que les jeunes générations ont de la peine à rester simplement sans rien faire, à cogiter sans but précis. Leur attention est toujours en phase de captation, leur regard focalisé sur l'écran du smartphone, leurs pieds les entraînant mécaniquement vers un lieu déjà informé de leur arrivée.
 
Il est vrai qu'avec Google comme grand maître d'œuvre, on n'a pas fini de se faire des films.